Moche coup a Moscou by Bruce Jean

Auteur:Bruce,Jean [Bruce,Jean]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Espionnage
Éditeur: Presses de la Cité
Publié: 1962-01-22T05:00:00+00:00

CHAPITRE

13

Elle se souleva sur un coude et regarda son amant qui reposait sur le dos, les yeux clos, le visage détendu, la respiration lente, profonde, régulière. C’était ainsi qu’elle le préférait : tout de suite après l’amour. Il semblait alors beaucoup plus beau et beaucoup plus jeune, et cela l’attendrissait, lui donnait envie de le prendre dans ses bras et de le dorloter, comme un gosse.

Il devina qu’elle le regardait et lui sourit, sans ouvrir les yeux.

— Tu n’es pas fatiguée ? questionna-t-il sans presque remuer les lèvres.

— Non. Je ne suis pas fatiguée.

Et, les mots prononcés ayant rompu le charme qui la retenait encore, elle se décida.

— Youri…

— Oui ?

— Si cela était possible, tu m’épouserais, n’est-ce pas ?

Il ouvrit enfin les yeux. Son regard bleu, un peu étonné, accrocha celui de sa maîtresse, impénétrable.

— Quelle curieuse question, chérie… Tu le sais bien. Si tu étais divorcée, et si les Autorités donnaient leur accord… Tu sais bien que mon plus cher désir est de vivre complètement avec toi et avec notre fils. Ce serait une chose tellement merveilleuse…

Elle restait immobile au-dessus de lui, le dominant, pareille à un sphinx.

— Si j’étais divorcée… Et si les Autorités de TON pays donnaient leur accord… Il me serait assez facile de divorcer, mais…

Il fronça les sourcils, visiblement intrigué.

— Nous en avons discuté dix fois, répliqua-t-il. Je ne t’ai jamais caché que cela me paraissait très difficile…

— Impossible.

— Il y a toujours une chance.

— Bien sûr ! dit-elle avec amertume.

Elle se laissa retomber sur le dos. Des perles de sueur brillaient entre ses seins. Il s’inquiéta :

— Qu’est-ce que tu as, ma petite colombe ?

— Rien.

Elle ferma les yeux et ajouta :

— Je m’amuse au jeu des suppositions.

Il chercha sa main. Leurs bras se touchèrent étroitement entre leurs corps nus. Elle enchaîna, d’un ton suffisamment détaché pour ne pas lui donner de soupçon :

— Supposons que je divorce, je serais obligée de retourner aux États-Unis, puisque je ne suis ici qu’en qualité d’épouse de diplomate…

Il resta muet.

— Pour que nous puissions vivre ensemble, continua-t-elle, il faudrait que tu quittes ton pays pour me suivre dans le mien. Nous pourrions alors nous marier et… élever notre fils comme tu le désirerais.

— Ce serait une chose merveilleuse, approuva-t-il d’un ton plein de réserve.

— N’est-ce pas ? Tu travaillerais…

— À quoi ?

— Ne me fais pas rire. Un savant comme toi vaut de l’or.

Les industries privées se battraient pour t’engager.

Elle se tourna vers lui, et souleva légèrement ses paupières, laissant son regard filtrer à travers le double rideau de ses longs cils. Il n’avait pas l’air enthousiaste, loin de là. Elle sentit son cœur se serrer.

— C’est toujours une supposition, se dépêcha-t-elle de préciser.

— Bien sûr…

— Est-ce que… Est-ce que tu accepterais ?

— Quoi ?

Il faisait semblant de ne pas comprendre.

— De me suivre aux « States », de m’épouser et de travailler là-bas ?

Il laissa s’écouler une dizaine de secondes avant de répondre :

— Je ne sais pas.

Piquée au vif, elle lui retira sa main.

— Tu ne m’aimes pas.

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